Les papillons du genre Heliconius
Les Heliconius sont des papillons que l’on rencontre dans les forêts tropicales d’Amérique centrale et sud. Ils sont notamment connus et étudiés par la science pour leur capacité à se mimer entre eux et à s’adapter rapidement aux changements de couleur et de comportement. Au sein de chaque espèce existe des populations qui présentent des pattern de coloration différents, semblables à d’autres populations d’espèces différentes situées dans la même localité géographique.
Ce processus de mimétisme prend origine dans une structure particulière de leur génome et sur le principe Müllérien qui consiste à ressembler à des espèces toxiques pour échapper aux prédateurs qui apprennent à ne pas consommer une certaine coloration.
Une thématique sur laquelle j’ai eu la chance de travailler au Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris : ici. Pour en savoir davantage sur les mécanismes génétique, je vous invite à lire cet article sur l’histoire évolutive de l’origine de la coloration de ces papillons.
En plus de ces particularités, les papillons Heliconius sont intéressants à d’autres points de vue.
Dans leur comportement alimentaire :
Contrairement aux autres papillons qui se nourrissent de nectar floraux, les Heliconius ont la particularité de s’alimenter de pollen. Grâce à leur proboscis (= la trompe), les
papillons collectent les grains de pollen qui s’y agrègent pour former une pelote (voir photo et vidéo ci-contre). Ensuite, par des actions mécaniques des mandibules et de sécrétions digestives (salive), le pollen est dégradé, absorbé et digéré.
Ce mode alimentaire est unique chez les papillons.
Comme cela est courant chez les insectes et notamment les papillons, chaque espèce est inféodée à une ou plusieurs espèces de plantes-hôtes spécifiques. Les Heliconius ne dérogent pas à cette règle, que ce soit à l’état de larve (chenille) ou à l’état d’imago (adulte).
– A l’état adulte : les papillons se nourrissent de pollen de certaines plantes comme Psiguria et Gurania (famille des Cucurbitacées), Psychotria et Palicourea (famille des Rubiacées) ou encore de Lantana camara (famille des Verbénacées). Les fleurs de ces plantes, étant noyées dans la végétation dense de la forêt tropicales, sont difficilement repérables. Un processus de co-évolution s’est mis en place entre les papillons et ces plantes. Les fleurs se sont emparées d’une couleur facilement repérable, comme le rouge, et les papillons ont acquis la faculté de percevoir les couleurs et de mémoriser l’emplacement de ces fleurs.
Certaines espèces d’Heliconius font preuve de comportements de fidélités, de territorialité et de défense de ces fleurs face à l’arrivée d’autres individus qu’ils repoussent activement. Un comportement peu commun chez les insectes et rare chez les papillons.
– A l’état de larve : les chenilles ne peuvent se développer uniquement sur des plantes-hôtes de la famille des Passiflores (famille des fruits de la passion). Par exemple, Heliconius hecale ne pond que Passiflora vitifolia (Passiflore à feuille de vigne) (voir vidéo en bas de page).
La densité en plantes-hôtes est plutôt faible, les femelles, pour éviter trop de concurrence et de mortalité entre les larves, ne pondent que 2 ou 3 oeufs quotidiennement au bout des tiges (voir vidéo). Les chenilles se retrouvent ainsi avec une quantité de nourriture suffisante pour accomplir leur cycle larvaire. Ce comportement est unique car les papillons pondent en général des dizaines, voire des centaines d’oeufs en une seule fois.
Les plantes-hôtes, au cours de l’évolution, pour se protéger de l’attaque des Heliconius, on mis au point une stratégie qui consiste à ériger des excroissances au bout des tiges (ou base des feuilles) imitant la forme et la couleur des oeufs. Ainsi, une femelle qui vient pour pondre se détrousse de la tige pensant que celle ci est déjà occupée. De plus, les Passiflores possèdent des nectaires (glandes sécrétant un liquide sucré et nutritif) à la base des feuilles attirant les fourmis, prédateurs des oeufs et des jeunes chenilles.
Les Heliconius sont aussi de bons modèles d’études en raison de leur élevage relativement facile et d’un temps de génération court (voir album photo « Elevage d’heliconius »).
Il est en effet possible de les attraper, de les manipuler aisément, de contrôler leur reproduction (croisement, récolte des oeufs), de les alimenter artificiellement (voir album photos) et de mener des expérimentations en génétique, en écologie ou encore en éthologie par exemple.
Voir l’article sur les Heliconius publié dans la revue Insectes de l’OPIE (Office Pour les Insectes et leur Environnement).
J’ai pu mener des travaux de recherche sur ces thématiques au sein de l’équipe de Mathieu JORON du Muséum Nationale d’Histoire Naturelle de Paris, et au Smithsonian Tropical Research Institue (Panama). Certains de mes résultats ont été publiés dans le revue Nature/Heredity (25 mars 2015) : à lire ici.
Pour plus de renseignements, n’hésitez pas à me contacter, je suis à votre disposition.
Plusieurs vidéos retraçant les différentes étapes du cycle de développement d’un papillon Heliconius :
- Ponte :
- Larve :
- L’éclosion :
Album photos de l’élevage de papillons Heliconius sur le site de Gamboa (STRI, Panama)
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