« Insectes », le nouvel ouvrage de Henri-Pierre Aberlenc – Interview de l’auteur

« Insectes », le nouvel ouvrage de Henri-Pierre Aberlenc – Interview de l’auteur

Par Benoît GILLES

Avec la parution du nouvel ouvrage des Editions Museo, Henri-Pierre Aberlenc, avec la collaboration de Laurence Ollivier et de Jean-Claude Beaucornu, nous offre une nouvelle fois l’opportunité de découvrir le monde des insectes et de sa diversité. Il nous présente 41 espèces à l’aide de magnifiques photos et d’un descriptif sur l’écologie et les particularité de chacune d’elle. 

Pour vous procurer l’ouvrage : Insectes

Interview de l’auteur

Vous êtes l’auteur principal de ce nouvel ouvrage fascinant, pouvez-vous nous raconter sa genèse ?

Le « Delvaberl » (Les Insectes du Monde) est un gros livre qui, à mon grand regret, impressionne trop de personnes qui se sentent inhibées pour l’aborder (interview de l’auteur). Les éditions Muséo m’ont proposé de faire un mini livre d’accès facile, qui pourrait désinhiber le lecteur, et lui donner envie de sauter le pas et d’aborder ensuite le Delvaberl. 

Mais ce petit livre se suffit aussi à lui-même, ce n’est pas seulement une introduction à l’autre !

J’ai repris un certain nombre de figures du Delvaberl, mais avec la satisfaction de les proposer cette fois en format pleine page, alors que par nécessité (il y a plus de 5 000 figures au total dans les planches du Delvaberl !) elles avaient été publiées sous forme de vignettes de petit format, ce qui ne les mettait pas assez en valeur. Et j’ai ajouté des photos encore inédites.

L’ouvrage met en avant certaines espèces, sur quels critères avez choisi celles-ci parmi les millions d’espèces connues ?

Hum ! Le choix a été dicté par des considérations pragmatiques et esthétiques très éloignées de tout critère biologique ! J’ai choisi des illustrations parmi celles que j’avais déjà, qui me plaisaient, il fallait des figures libres de droit, et leur nombre a été imposé par les dimensions du livre…

Quel rôle ont joué Laurence Olivier, Jan-Claude Beaucornu, Axel Bourdonné et Laurent Soldati ?

J’ai repris les belles photos de Laurence Ollivier (le Dynaste pris sur le vif en Equateur) (figure 1) et de Laurent Soldati (une splendide photo d’un Doryphore), ainsi qu’un très beau dessin de tête de puce par Jean-Claude Beaucournu.

Axel Boudonné est un jeune entomologiste talentueux, qui m’a succédé au labo d’entomologie du Cirad au CBGP à Montpellier après mon départ à la retraite. Je lui ai proposé de publier quelques-unes de ses photos et il a accepté avec plaisir.

Figure 1 : Coleoptera Dynastinae
Les photos sont d’une incroyable qualité et beauté, pouvez-vous expliquer quel est le matériel et les techniques nécessaires pour obtenir ce type de rendu ?

Les dessins ont été faits à l’encre de Chine sur un support grattable (carte à gratter ou calque). 
A part la photo du Dynaste, toutes les photos ont été faites avec un système multifocus. Pour les « grosses » espèces (de plus d’1 cm), on a utilisé un reflex macro monté sur un statif de reproduction, et fusionné la pile d’images obtenues avec le logiciel Helicon Focus (par exemple le grand hydrophile).

En photo, la difficulté est dans l’art de faire un bon éclairage ! Après les tubes fluorescents, j’emploie désormais des lampes flexibles à leds (pour un bon rendu chromatique, il faut toujours mesurer la balance des blancs !) avec des réflecteurs en papier blanc et du papier calque et/ou du plastique translucide tout autour de la bestiole pour obtenir une lumière diffusée douce. C’est indispensable pour les bestioles à coloration « métallique » !

Cela me rappelle une anecdote. J’ai publié des planches de Buprestes en 2006 dans le volume 92 de la « Faune de Madagascar ». J’avais travaillé les photos avec Photoshop en ayant les échantillons (bien éclairés) sous les yeux, pour être le plus fidèle possible aux couleurs réelles. Et un collègue, qui avait toujours vu ce type des bestioles avec un mauvais éclairage, m’a reproché d’avoir trop saturé les photos !

Pour les « petites » espèces (d’environ 1 cm et au-dessous), on a utilisé un système multifocus vendu complet (microscope + objectif(s) + caméra + éclairage + système logiciel), pour les plus anciennes avec Entovision (par exemple le Doryphore), pour les plus récentes avec Keyence (par exemple le Chryside – figure 2).
Ce dernier appareil permet de faire des photos fabuleuses, où on voit davantage de détails qu’avec les meilleures loupes bino ! Hélas Keyence est très cher (des dizaines de milliers d’euros) et réservé à des laboratoires et des entreprises, c’est hors de portée pour l’amateur, sauf s’il est richissime… Keyence ferait un tabac s’il sortait un modèle simplifié « grand public » à bon marché avec un système de vente à crédit !

Figure 2 : Hymenoptera Chrysididae
Il y a tant à dire sur chacune de ces espèces, le travail de synthèse des textes n’a pas du être évident, quels sont les informations que vous avez souhaité mettre en avant ? 

Les mini-monographies qui accompagnent chaque espèce présentée m’ont demandé chacune une petite enquête, et j’y ai ajouté quelques observations de mon cru. Le résultat est très inégal. Dans certains cas, il y avait tant à raconter sur la biologie que j’ai du à mon grand regret raccourcir le texte pour des raisons de place !

Dans bien d’autres cas, on ne trouve aucune donnée sur la biologie des espèces, même pas la plante-hôte, on n’a accès qu’à la répartition géographique, et encore en très gros traits ! 

En vérité, on ignore presque tout de la biologie de la majorité du million d’espèces décrites…

Parmi toutes ces espèces, quelle est pour vous l’espèce la plus incroyable, pourquoi ?

Le Languride mimétique du Staphylin est assez extraordinaire (figures 3 et 4), mais la biologie des Gyrins n’est pas mal non plus ! Les solutions du vivant sont tellement sophistiquées et élégantes ! 
Les élytres du Languride, qui recouvrent l’abdomen, imitent la coloration des élytres raccourcis du Staphylin et de son abdomen, c’est du trompe-l’oeil raffiné !
Et les performances des gyrins sont à couper le souffle … les découvrir a été pour moi une révélation – et je n’ai pas eu la place de tout dire !

Figure 3 : Coleoptera Staphylinidae
Figure 4 : Coleoptera Erotylidae Languriinae
Pour finir, auriez-vous une anecdote à raconter à nos lecteurs à propos de cet ouvrage ?

Pour le Delvaberl, j’ai travaillé pendant 9 mois avec l’excellent Diptériste Michel Martinez pour faire avec lui et sous sa direction les illustrations de son chapitre consacré aux mouches (chapitre d’ailleurs remarquable et novateur, que je recommande)

Cela a été pour moi, coléoptériste invétéré, une révélation : les Diptères sont incroyablement beaux (malgré les apparences) et intéressants ! J’ai donc tenu à partager cette découverte avec les lecteurs, en proposant des mouches (photographiées au Keyence) que je trouve très belles… mais idéalement il aurait fallu tirer ces photos au format poster (tant elles ont de pixels) ! (figure 5)

Figure 5 : Diptera – Heleomizydae


Pour vous procurer l’ouvrage : Insectes

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