Par Philippe GARCELON
Présentation
Je m’appelle Philippe Garcelon et réside aujourd’hui en région toulousaine. Je suis né dans un petit village du Cantal et dans les années 1960-70, une bonne part de mes distractions se résumait à des escapades dans la nature. Déjà, je débutais mes premières collections d’insectes.
Malheureusement je délaisserai mon « terrain de jeu » pour des études supérieures à l’issue desquelles j’ai intègré un grand groupe français. A cinquante ans, alors cadre de direction, je décide de changer de vie pour me consacrer à des centres d’intérets plus proches de mes aspirations.
Dans un premier temps je me tourne vers l’astronomie et l’astrophysique, ce qui me permet aujourd’hui d’effectuer des missions régulières sur le coronographe du Pic du Midi. Mais je n’en oublie pas pour autant les insectes ou les arachnides qui sont un excellent prétexte pour m’adonner à la macrophotographie que je découvre.
C’est fortuitement, qu’en 2016, je rencontre mes premiers collemboles alors que j’ignorais jusqu’à leur existence. Je cherche à me documenter à leur sujet et constate rapidement la relative pauvreté de publications abordables les concernant. Rapidement, ces petits arthropodes me fascinent, au point que j’éprouve le besoin de partager cet engouement.
Bien sûr, je ne saurais revendiquer la compétence de l’entomologiste de métier pour proposer autre chose qu’une approche vulgarisatrice à leur sujet. Pour autant, je fonde une certaine légitimité de mon propos à travers un noble moteur qui m’anime, celui de la passion.
Ou vivent les collemboles ?
Si méconnus, ils sont pourtant disséminés un peu partout sur Terre. Ils vivent au sol, sur l’eau en bordure des étangs, en haute montagne, dans les déserts, les grottes et même sous des latitudes polaires. Actuellement on en a répertorié plus de 8000 espèces et il en reste probablement davantage à découvrir. On ne soupçonne pas l’abondance de ces créatures. Dans certains habitats, leur densité peut atteindre plusieurs centaines de millions d’individus par hectare, toutes espèces confondues. Par exemple, lorsqu’on se promène en milieu naturel, sous l’empreinte d’un seul de nos pas, ils sont parfois plusieurs centaines à évoluer entre la surface et quelques centimètres de profondeur. Dans les habitats forestiers où abondent les feuilles mortes en décomposition, il n’est pas forcément exceptionnel (dans certaines zones où domine notamment le chêne) de trouver de 200 000 à 300 000 collemboles par m² !
Quelles sont les premières traces écrites à propos des les collemboles ?
Les collemboles sont absents dans la littérature antique. Il semble qu’Aristote (-384 à -322 av. J.-C.) fut le premier à évoquer des « vers » qui pourraient bien être des collemboles. Je le cite : « La neige produit elle-même des vers en vieillissant. Comme le temps la rend rouge, ces vers sont rouges aussi : ils sont velus. En Médie ils sont blancs et grands. Les vers de la neige sont tous paresseux à se mouvoir ». Ensuite, Il faut patienter plus trois siècles avant de retrouver une mention indirecte au texte d’Aristote, évoqué succinctement par Pline l’ancien (23-79) dans son ouvrage « Histoire naturelle ».
Les premières mentions plausibles de cet arthropode, alors décrit comme un « ver », datent seulement de la fin du XVIIème siècle. Par exemple, dans les éphémérides de « l’Académie des curieux de la nature d’Allemagne », le Docteur Charles Raygerus (médecin hongrois) raconte comment en 1672 « Il tomba dans un pré en Hongrie plus de dix espèces de Vers avec de la neige, lesquels y vécurent, & qu’on y vit remper par troupes pendant plus de quatre jours … ».
Quelques années plus tard, un certain Docteur Jean Chrétien Frommannus observe le 2 décembre 1684 des « puces de neige ». Mais Ce n’est qu’au début du XXème siècle que des chercheurs étudieront sérieusement ces animaux auparavant classés en tant qu’insectes. On voit alors apparaitre dans les premières classifications (vers 1740) de Carl von Linné le terme de « Podura » au sein des « Aptera » (signifiant sans ailes) et décrits de la sorte : « courbés et danseurs avec une queue fourchue »
Ou se situent-ils dans la classification ?
Longtemps considérés comme des insectes, les collemboles forment aujourd’hui une classe à part entière au sein du sous embranchement des hexapodes comme le montre ce tableau.
Au sein des quatre ordres, les espèces actuellement identifiées se répartissent de la manière suivante :
*Données actualisées au 5-11-2017, car on découvre très régulièrement de nouvelles espèces, en particulier avec les études du code barre ADN, permettant de dissocier des espèces sur des sujets morphologiquement très proches
Comment peut-on les observer ?
Généralement, il faut se mettre à quatre pattes, en sous-bois, sur un tapis de feuilles mortes et scruter le sol. Minuscules (0.25 à 4.5 mm), ils cohabitent avec d’autres animaux plus petits comme les acariens. Si on ne voit rien à la première approche, il faut alors soulever délicatement les couches superficielles de la litière et se remettre à observer. Beaucoup d’entre eux sautent lorsqu’ils se sentent en danger, ce qui nuit à l’observation mais, en contrepartie, facilite leur repérage.
Comment les photographier ?
Photographier d’aussi petits animaux, surtout lorsqu’on souhaite le faire en milieu naturel, nécessite l’utilisation d’un minimum de matériel et surtout une bonne connaissance de leur biotope. Pour ne pas être rebuté, il convient de chercher les plus grands (Orchesella – env. 4.5 mm) photographiables avec un objectif macro classique. Mais, très rapidement, on se confronte à l’écueil dimentionnel et aux limites techniques de notre matériel. En effet, Orchesella, qui est déjà un très petit sujet, est encore dix fois plus grand qu’une bonne part des autres collemboles qui mesurent de l’ordre du millimètre ou moins encore (0,25 mm pour les plus petits). L’acquisition de bagues allonge ou d’un multiplicateur de focale devient incontournable. Mais la meilleure solution est d’utiliser l’objectif CANON 65MM MP-E F/2.8 MACRO, unique en son genre et qui permet un rapport de grossissement x5. La contrepartie inévitable est qu’à des grossissements (x3 ou x5) avec, par exemple, une ouverture f/8, les profondeurs de champ sont réduites respectivement à 0.25 mm et 1.03 mm. Autrement dit, la maîtrise d’un tel objectif n’est pas une mince affaire. Mais tel est le prix à payer pour approcher cet autre univers, celui de la micro-photographie.
Comment situer les collemboles sur l’échelle des temps géologique ?
Ils sont parmi les premiers arthropodes à avoir colonisé la planète il y a 400 Millions d’années. La Terre était une étendue d’eau d’où émergeaient quelques blocs groupés autour d’une masse continentale nommé Gondwana. C’est au cours du Silurien et du Dévonien que les plantes chlorophylliennes et plusieurs grands groupes animaux (principalement les Arthropodes et les Vertébrés) ont acquis des structures anatomiques et des fonctions physiologiques qui leur permettent de vivre hors de l’eau et de conquérir les terres émergées. Les vastes espaces marécageux et les zones de faibles profondeurs se peuplent ainsi de nouvelles espèces d’amphibiens. Sur la Terre, parmi les bactéries bien implantées émergent également les arthropodes, comme les crustacés isopodes (cloportes), les myriapodes (mille pattes), les chélicérates (ancêtres des araignées et scorpions), quelques insectes et surtout les premiers collemboles. Les premiers fossiles connus (ci-dessous) classifiés comme collemboles (Rhyniella praeccursor) ont été découverts en 1926 à Rhynie non loin d’Aberdeen en Ecosse, dans des dépôts de vieux grès rouges du Dévonien moyen (env. -380 Ma), par Hirst & Maulik qui les ont apparentés aux Poduromorphes actuels.
Depuis cette période, ils ont survécu à des extinctions massives comme celle du Crétacé (-66 Ma) qui a vu disparaître les grands dinosaures. On en retrouve ainsi dans des ambres fossiles de la Baltique, datant de -40 Ma et le plus surprenant est que ces derniers ressemblent presque traits pour traits à des espèces actuelles. Les observer revient donc à effectuer une sorte de voyage dans le temps.
Morphologie
D’apparences diverses, leurs fonctions physiologiques sont similaires et ils disposent de caractères communs : Ils sont entognathes (pièces buccales rentrées dans la tête) ce qui les différencie des insectes, possèdent des antennes segmentées, 3 paires de pattes rattachées aux 3 segments thoraciques et 6 segments abdominaux. Leur corps peut être couvert de poils ou d’écailles. Leur peau possède des propriétés hydrophobes, comme nos tissus déperlants. Ils peuvent présenter des motifs ou diverses pigmentations.
Il existe quatre ordres de collemboles :
- Les Entomobryomorphes vivant en surface, dotés d’un organe sauteur nommé furca et dont le corps allongé possède des téguments plus durs couverts de poils
- Les Poduromorphes, qui vivent plutôt sous terre, ne sautent pas, sont parfois aveugles et ont un corps mou et souvent boudiné
- Les Symphypléones, sauteurs aux segments thoraciques et abdominaux fusionnés leur donnant un aspect globuleux
- LesNeelipleones (ordre rassemblant des collemboles « globuleux » de très petit taille)
Mode de vie
Leur physiologie nécessite un fort taux d’humidité, ils vivent et se reproduisent d’autant mieux que l’hygrométrie est élevée. Il est donc plus aisé de les voir évoluer à la fin de l’automne en hiver ou au printemps que durant les périodes sèches où ils se réfugient profondément et limitent leurs mouvements. Leur durée de vie à l’état naturel est d’environ un an. Leur alimentation est constituée de végétaux en décomposition et peut également comporter des micro-organismes ou des champignons. Leur reproduction peut être sexuée ou asexuée (parthénogénèse).
Reproduction
Une part d’entre eux se livre à des sortes de parades amoureuses (voir vidéo ici : parades amoureuses ) qui rappellent des chorégraphies codifiées selon les espèces et qui ont toujours pour objet l’efficience de la reproduction. Suivant les conditions climatiques, les œufs mettent d’une à quatre semaines pour éclore. Ils ne connaissent pas d’état larvaire, les petits collemboles naissent déjà formés avec la même morphologie que leurs parents. Leur taille évoluera régulièrement par l’intermédiaire de mues successives.
Quelques spécificités anatomiques
La Furca organe sauteur
Contrairement aux insectes, ils ne possèdent pas d’ailes. En revanche leur anatomie comporte des organes qui leurs sont propres, comme la « furca » qui leur sert à effectuer des sauts pour fuir des prédateurs ou pour quitter rapidement le milieu où ils évoluent lorsqu’ils sentent un danger. Bien que pouvant dans certains cas maîtriser la direction dans laquelle il saute, le collembole ne maîtrise généralement pas toutes les composantes de ses sauts et, de ce fait, il ne peut pas s’en servir comme moyen ordinaire de locomotion. Sur l’image ci-dessus, la furca, fixée au quatrième segment abdominal est composée, à sa base, du manubrium (1) qui renferme la partie musculaire et qui se divise en deux branches chacune constituée des dentes (2) terminés chacun par un article nommé mucron (3).
Le collophore
Le collembole est également doté d’un tube ventral nommé collophore, sorte de tuyau plus ou moins allongé selon les groupe qui est constitué d’un tube portant à sa base une paire de vésicules excrétiles à parois minces. Ces derniers se rétractent dans le cylindre par l’intermédiaire de douze muscles dits rétracteurs. Ils sont dotés d’organes sensitifs interprétés comme hydrorécepteurs, osmorécepteurs et récepteur pH (acidité/basicité) ainsi l’animal peut augmenter ou réduire ces valeurs en sortant ou en rétractant ses vésicules. La fonction principale du collophore est donc hydrique, à travers le transport de l’eau et des ions vers l’hémolymphe. Cet organe servirait enfin à des fonctions secondaires, comme par exemple, grâce à une glande adhésive, à maintenir le collembole en place lorsqu’il évolue sur des surfaces lisses. On peut également citer la fonction respiratoire grâce au passage de l’oxygène à travers sa paroi fine.
La cuticule
La cuticule (peau) présente également des caractéristiques étonnantes. L’étude des fonctions physiologiques du collembole nous apprend qu’il respire à travers sa cuticule et qu’un dessèchement de cette dernière lui serait fatal, c’est pourquoi il affectionne les milieux humides. Mais l’excès d’humidité lui serait tout aussi fatal s’il venait à recouvrir sa cuticule. C’est donc essentiellement pour se protéger du risque d’asphyxie que le collembole a développé une cuticule dont la nanostructure possède une organisation complexe qui lui permet de repousser efficacement l’eau. Afin de permettre une bonne respiration cutanée, la cuticule doit en effet rester propre, sèche et exempte de toute souillure qui pourrait réduire sa surface fonctionnelle.
Exemple : Les propriétés hydrophobes de la cuticule du collembole sont mises en évidence sur cette photographie d’un Dicyrtomina ornata (On doit ici prendre en compte l’évaporation de l’eau contenue dans le substrat et l’accroissement du taux d’humidité de l’air qui s’en suit. Au contact d’une surface froide cette humidité se condense sous la forme de fines gouttelettes, comme on peut le voir dans la nature sur divers supports : herbes, mousses, toiles d’araignées etc…).
Explication : Dans le cas de ce collembole, la chose n’est pas aussi simple car ce n’est pas en raison de la seule condensation que l’on observe la formation des gouttelettes. En effet, la structure de l’épicuticule du collembole forme une trame de cellules ouvertes (revoir le schéma ci-dessus) dans laquelle l’air humidifié se retrouve piégé. L’absence de flux d’air au sein de cette structure aura pour conséquence d’accroître le taux d’humidité qui, devenant supérieur à celui de l’air ambiant, permet la formation de condensation ; non pas en raison d’une différence de température mais bien à cause du différentiel de taux d’humidité, car à température constante, le point de rosée (formation des gouttelettes) dépend du différentiel de saturation de l’air en eau (pour comprendre ce phénomène, voir : point de rosée).
On pourra donc observer, sous certaines conditions, la formation de ces fines gouttelettes dues à la condensation d’une part et, d’autre part, aux propriétés hydrophobes de la cuticule (évoquées précédemment). Les piliers cuticulaires, de par leur structure et aussi grâce à leur surface riche en lipides, rejettent en effet ces gouttelettes en surface. Les plus fines d’entre elles s’agglomèrent ensuite pour former des sphères liquides de plus en plus grosses, jusqu’à ce que la gravité les entraîne vers le sol.
Existe-t-il des espèces possédant des spécificités ?
Si je me réfère à mes propres observations, je ne pourrais guère citer que le Cyphoderus albinus qui présente la particularité de vivre en parfaite complémentarité avec certaines fourmis. En effet, en échange de travaux de nettoyage (ces collemboles mangent les champignons susceptibles de contaminer les maternités souterraines des fourmis), les fourmis marquent ce collembole avec les phéromones de leur communauté, de telle sorte que ces dernières les considèrent comme des leurs.
Certains Poduromorphes de l’ordre des Neanurinae, comme le Neanura muscorum (image ci-dessous) bien que faciles à prédater en apparence, de par leur morphologie et leurs faibles capacité défensives semblent totalement délaissés par les acariens, araignées ou myriapodes qui sont leurs prédateurs habituels.
Les chercheurs qui ont effectué des études chimio-taxonomiques ont découvert que ces espèces sécrètent des substances répulsives (ici le Dimethoxybenzène) qui suffisent amplement à décourager les prédateurs. Ces recherches effectuées sur de nombreuses autres espèces ont permis de mettre en évidence des évolutions de stratégies défensives directement liée avec les intensités prédatrices qui pèsent sur elles.
Quel rôle jouent les collemboles ?
I) Décomposeurs des sols
Ils jouent un rôle essentiel dans la décomposition de la matière organique, contribuant à l’équilibre écologique de la microfaune en permettant la dissémination et la régulation des populations de champignons et de bactéries. Indispensables à la circulation des nutriments vitaux pour les plantes, ils jouent en amont un rôle dans le découpage et la fragmentation des végétaux avant que les micro-organismes (bactéries, champignons, protozoaires, algues, nématodes…) n’interviennent.
On note différentes phases dans le cycle fragmentation organique à travers l’illustration ci-dessus. A chacune des étapes les collemboles jouent un rôle majeur. On peut en établir une chronologie :
- D’abord, les feuilles tombées de l’arbre s’entassent dans un premier temps sur le sol où elles sont d’abord lavées par les pluies. La microfaune entre en action. Les arthropodes (collemboles, acariens) commencent à attaquer l’épiderme des feuilles où les premiers trous ne tarderons pas à apparaître
- Les petites larves de diptères agrandissent les échancrures et la microflore (bactéries et champignons) entre en action
- Les arthropodes continuent de découper les feuilles, les plus robustes d’entre eux attaquent leurs nervures ramollies par la microflore
- La fragmentation des débris se poursuit et une partie d’entre eux se mêle aux déjections issues des étapes précédentes
- La dissémination des résidus organiques et l’humidité automnale ambiante stimulent la microflore et accélère la dispersion des éléments minéraux
On peut déplorer qu’au terme de ce cycle, les composés chimiques non assimilables par ces organismes vivants, s’ils ne les tuent pas, hypothèquent dangereusement les cycles de biodégradation à venir. C’est ainsi qu’au fil du temps se forment des concentrations croissantes de substances nocives dans les sols. Toute action qui vise à la préservation de la biodiversité ne trouve pas sa seule justification dans des considérations idéologiques, mais plus simplement dans une manifestation de l’instinct de survie. Ainsi, l’homme qui répand des insecticides ou autres poisons ciblant animaux et végétaux parasites (substances pudiquement nommées phytosanitaires) n’en tire qu’un bénéfice à très court terme. En revanche, il peut être assuré que ses actes auront des conséquences dont il sera un jour victime.
II) Marqueur écologique
Dans les études de qualité des sols, les collemboles sont de précieux auxiliaires. La « star » des laboratoires, le Folsomia candida est devenu une espèce standard faisant l’objet d’une norme ISO. Utilisé dans de nombreuses expériences ce dernier a conduit à l’établissement de la norme ISO11267 qui détermine la qualité d’un sol en fonction de l’inhibition à la reproduction de cette espèce. Le comportement des collemboles lors des tests de résistance auxquels on les soumet, permet aux chercheurs d’établir des statistiques sur les nuisances causées aux sols par les agressions chimiques dues aux activités de l’homme (pollution aux métaux, pesticides ou déchets agricoles et domestiques).
L’exemple ci-contre montre le comportement des Folsomia candida au contact du « carbaryl », un insecticide et un régulateur de croissance utilisé dans l’agriculture pour freiner la chute des fruits.
Ici, deux types de population sont testés : Les juvéniles et les adultes, sur une plage de concentration en carbaryl allant de zéro à 7 mg/kg de substrat durant une période de 28 jours. Comme le montre le graphique, les résultats sont édifiants. Avec une dose de 6 mg, les populations sont réduites de moitié alors qu’avec 7 mg, ces dernières sont totalement décimées. On peut noter que durant cette exposition les collemboles ont continué de se reproduire ; entre 4 et 7 mg de concentration des différences significatives ont été enregistrées avec une population test (non exposée). En revanche 7 mg/kg représentent un seuil au-delà duquel tout meurt. EC50 (concentration efficace) se situe à 5.1 mg/kg et LC50 (concentration létale) situe à 5.4mg. On comprend dès lors d’où proviennent les préconisations d’utilisation données par les fabricants de tels produits…
Cet exemple souligne les effets néfastes de toutes ces molécules chimiques que l’agriculture utilise. On peut supposer que les impacts sur l’homme auront, à terme, de graves répercussions sur sa santé. Certes les doses de ces substances qui entrent dans nos organismes sont peut-être infinitésimales relativement à notre masse corporelle, mais de même qu’elles s’accumulent dans nos sols, notre organisme les stocke jusqu’à ce qu’un jour, les concentrations atteignent des seuils fatals, à l’image de ceux qui tuent chaque jour des milliers de petits Folsomia candida dans les laboratoires de recherche du monde entier… Et que faisons-nous pendant ce temps-là ?
Une conclusion ?
Il me semble que nous devrions apprendre à rester humbles devant ces « insignifiantes créatures ». En effet, les collemboles nous indiquent une voie dont nous nous écartons trop souvent par nos pratiques ; celle de la préservation des ressources naturelles, sans lesquelles l’extinction massive qui a déjà commencé au XXème siècle pourrait rapidement exposer notre espèce au premier rang, devant notre incapacité à penser et à agir au-delà de la durée d’une génération.
Un grand merci à « Passion Entomologie » pour m’avoir offert l’occasion d’évoquer les collemboles. Si vous souhaitez en savoir davantage à leur sujet je vous propose de consulter le site que je leur dédie https://collemboles.fr
Source
- Filipe D. & Cardoso N. (2002) : Combined effects of carbaryl and abiotic factors to Folsomia candida. Universidad de Aveiro – Departemento de Biologica (lien)
Recommandations d’ouvrages sur cette thématique
- Planète Collemboles : La vie secrète des sols (Philippe Lebeaux & Jérôme Cortet – Biotope Editions – 252 pages – 17 novembre 2015)
- Ces animaux minuscules qui nous entourent(Régis Cleva, Yves Coineau & Gaëtan du Chatenet – Delachaux & Niestlé Editions – 77 pages – 3 octobre 1997)
- Le petit collembole illustré (Jean-Marc Thibaud & Cyrille A. D’Haese – 60 pages – 2010 – A télécharger ici)
- Biology of the spingtails (Stephen P. Hopkin – Oxford University Press – 344 pages – 15 mai 1997)
Galeries Photos
- Collembola/springtails from around the world : La plus vaste galerie existante qui compile des photographies de collemboles à travers le Monde
- https://www.animailes.com/portfolio/la-microfaune-et-mesofaune-du-sol/ : Galerie de Philippe Lebeaux, photographe de collemboles
- https://www.flickr.com/photos/jeromepi/albums : Galerie de Jérôme Picard – Les collemboles y sont en bonne place, classés par albums spécifiques
Galeries photographiques de Philippe Garcelon
Sites dédiés aux collemboles
- http://www.collembola.org/ : Site de référence tenu par Frans Janssens, membre de la Société Royale d’Entomologie de Anvers. Associé de laboratoire du Département de biologie, groupe de l’écologie évolutive de l’université d’Anvers en Belgique
Autres liens utiles
- https://www.insecte.org/spip.php?rubrique25 : Site disposant d’une galerie d’images de collemboles
- http://aramel.free.fr/INSECTES6-1.shtml : Site tenu par l’entomologiste Alain Ramel avec une rubrique consacrée aux collemboles
- http://www.bioone.org/doi/10.5252/z2017n3a1 : Site où on peut télécharger le PDF du « catalogue des collemboles de France » établi par J.M. Thibaud.
Vraiment très intéressant, Bravo!
Bonjour,
Je viens de parcourir votre blog, je le trouve vraiment complet et riche scientifiquement, accessible et bien structuré, bravo ! Hâte de découvrir de nouveaux articles !
Je tiens également un blog : l’Odyssée Terrestre, portant sur le même thème que le vôtre (écologie, environnement) ainsi que sur la paléontologie !
Bravo, c’est super Philippe, tu es vrai doué ,continue
Bonjour,
Je cherche peut-être la petite bête … les collemboles ne sont pas des insectes si l’on croit les dernières hypothèses phylogénétiques mais ils appartiennent à une classe à part au sein des Hexapodes Les insectes appartiennent à une autre classe. Voir par exemple : https://collemboles.fr/classification/7-classification-des-collemboles.html$ ou http://www.collembola.org/
L’article est très intéressant et original comme les autres sujets traités dans ce blolg
Belle soirée
DD
Bonjour,
je lis cet article et je trouve votre résumé bien fait.
Cependant, le titre est à changer… car les collemboles ne sont pas des insectes comme vous l’écrivez d’ailleurs
Pourriez vous avoir la gentillesse de m’informé si une collembole peux vivre sous la peau? Si oui lesquels?
Beaucoup de personne ayant la maladie du morgellon prétendent avoir des collembole sous la peau auriez vous des détails a cette effets?
Un gros merci et votre site est très explicatifs.
Nathalie Proulx
Bonjour madame,
voici la réponse de l’auteur de l’article :
« Les collemboles ne peuvent absolument pas vivre sous la peau de l’homme pour des raisons évidentes. Ils seraient dans l’incapacité de s’y nourrir car leur alimentation est essentiellement composée de débris végétaux et/ou de microchampignons. Ils ne pourraient pas y respirer, quelles que soient les espèces, car leur respiration ne peut s’effectuer qu’à l’air libre, à travers leur peau ou par l’intermédiaire d’un réseau trachéen. Il ne pourraient pas non plus s’y déplacer, car ils ne disposent d’aucun d’organe susceptible de forer des galeries dans un quelconque tissu, mort ou vivant.
En espérant avoir répondu à votre question ».
Benoît GILLES
très intéressant, car je migre vers ce domaine
Bonjour,
Merci infiniment pour vos travaux et explications,
Je suis abonné à Sciences&Avenir qui sort ce mois d’avril 2020 un numéro spécial de 80 pages sur « la vie secrète de la forêt » ce qui est à l’origine de ma recherche sur le collembole et du coup je vous ai trouvé. Je connaissais le terme de collembole, sachant par des articles précédents, que les traitement au cuivre des viticulteurs lui étaient néfastes. J’ai la chance d’habiter à la Cadière d’Azur dans le Var et ma maison est entourée de domaine viticoles qui seraient tous en agriculture raisonnée pour certains en HVE (haute valeur environnementale,) et quelques uns sont déjà au bio. Le tout nouveau président de l’association des vins de Bandol (270 exploitants de vins de Bandol sur 1500 ha) propriétaire du domaine la Suffrène et qui est en HVE va inviter en 2020 la population à des réunions d’échange pour que les riverains soient mieux au fait des contraintes et problèmes des viticulteurs et que les viticulteurs entendent les demandes des riverains sur les risques des épandages et des nuisances sonores des travaux de nuit par exemple.
En ce sens, je suis d’autant plus intéressé et honoré d’être ajouté à votre liste de diffusion. Dans l’éventualité ou des gens seraient intéressés à suivre une conférence dans vos domaines de compétence sur la nature, seriez vous susceptible de venir faire une conférence à la Cadière d’Azur.
Je vous remercie de votre attention.
Bien à vous
Marcel SIMON
Bonjour,
Je viens de lire votre recherche sur les collemboles. Je vis en Polynesie, dans une maison à même le sol très proche de la montagne, la végétation autour de la maison est très dense. La maison étant très mal située je récupère les inondations des maisons alentours sitôt qu’il pleut et le tour de ma maison est toujours humide. Depuis quelques temps, je suis infestée de parasites partout dans la maison. Les vêtements, les meubles, le sol, absolument partout. Lorsque je fais des recherches, ce parasite se rapproche le plus du Cyphoderus albinus en photo dans votre description. Il saute. Il y en a partout dans toute la maison et parfois j’en trouve sur moi. Est ce nocif pour l’homme et les animaux domestiques? Savez vous comment je peux m’en défaire? Je déménage cette semaine et je veux tout faire pour ne pas les emmener avec moi dans mon nouveau logement!!! je vais laver tout ce que je peux à haute température mais je vais forcément en louper quelques uns, il y en a tellement partout….
Merci pour votre aide et toute explication que vous pourrez me donner,
Cdt,
Caroline
Bonjour et merci de m’avoir fait découvrir ce monde fascinant dont je connaissais en partie seulement l’existence. Depuis notre rencontre à la ruée vers l’art je ne regarde plus tout à fait les monceaux de feuilles de platanes qui s’amoncellent sur mon terrain ( j’ai un bois de 72 platanes… peut-être est-ce intéressant de voir quel type de Colombelles vivent ici pour autant que selon les essences d’arbres il pourrait y avoir des colombelles spécifiques. Si cela vous dit, n’hésitez pas à me contacter.
Bien cordialement
Jpierre Montagné