Nouvelle Phylogénie de l’évolution des insectes établie

Nouvelle Phylogénie de l’évolution des insectes établie

Une équipe internationale de chercheurs vient d’établir une nouvelle phylogénie* des insectes qui permet de retracer l’histoire évolutive des différentes familles à l’aide d’outils moléculaires et génétiques, et d’analyses comparatives entre de milliers de gènes et de séquences nucléotidiques* (* définition en fin de page).

Photo et illustration du plus vieux fossile d'insecte (Strudiella devonica)
Photo et illustration du plus vieux fossile d’insecte (Strudiella devonica)

Le plus ancien fossile d’insectes connu est âgé de 412 millions d’années (début de l’ère géologique du Dévonien), ce qui indique que les insectes prennent leur origine bien avant, durant l’Ordovicien (485-440 millions d’années), voir durant le Cambrien (540-485 millions d’années). Le manque de fossiles durant ces deux périodes empêche de concevoir l’histoire de leur apparition de manière certaine.

Les insectes sont les premiers organismes à s’être adaptés à la vie terrestre et à l’eau douce, ils se sont dès lors diversifiés en de très nombreuses familles comme les papillons (Lépidoptères), les mouches (Diptères), les libellules (Odonates), les Coléoptères, les termites (Isoptères), les criquets (Orthoptères), et bien d’autres. Les insectes ont évolué et se sont adaptés durant ces millions d’années à toute une gamme d’environnement et de modifications climatiques, et ont aussi développé le vol et la vie en société.

Pour ceux qui se posent la question : « Qu’est ce qu’un insecte? », suivre ce lien.

C’est pourquoi, il est très intéressant de déterminer les

successions d’événements évolutifs qui sont à l’origine de l’apparition de cette diversité. Il s’agit de caractériser l’ordre et le rythme des innovations morphologiques et physiologiques à l’origine de la diversification des insectes. Par exemple, les relations qui existent entre les insectes hémimétaboles (Orthoptères, Isoptères…) et holométaboles (Diptères, Coléoptères, Lépidoptères…) sont encore inconnues (pour en savoir plus, lire cet article).

Cette équipe de scientifiques, au lieu de se baser sur des informations issues de fossiles, ont étudié le génome : des gènes et des séquences de génome d’insectes vivant aujourd’hui, sélectionnés pour représenter l’ensemble des familles et des taxons* (* définition en fin de page). Ce sont ainsi 1 478 gènes appartenant à 103 espèces, soit 2,5 gigabases d’ADN, qui ont été analysés. L’analyse consiste à assembler des même gènes et séquences d’ADN d’espèces de familles différentes et de les comparer entre eux pour évaluer le nombre de différences au sein des séquences. Plus les séquences diffèrent, plus la divergence entre les deux familles est lointaine. Cette technique se base sur 2 principes : les taux de mutations (erreur de réplication de l’ADN durant une division cellulaire) et l’horloge moléculaire (échelle de temps à laquelle apparaissent les mutations). Cela reste complexe à expliquer en quelques lignes, excusez moi de passer rapidement sur cette partie…

Les résultats de cette étude, publiée dans Science, suggèrent que les premiers hexapodes, les ancêtres communs de tous les insectes, seraient apparus au Dévonien vers 479 millions d’années, et le début de leur diversification vers 441 millions d’années. La radiation des premiers insectes (Ectognathes) semble être liée à celle des plantes qui colonisent le milieu terrestre à cette époque (voir illustration ci-dessous).

Cette étude révèle une première période de forte diversification des insectes qui est liée à l’acquisition du vol. Les premiers fossiles d’insectes volant, découverts dans la région du Mississippi, remontent aux Carbonifères (324 millions d’années), la description d’un insecte avec des organes ressemblant à des « ailes » (Rhyniognatha) indique que les ailes sont apparues durant le Dévonien (415-360 millions d’années), voir le Silurien (440-415 millions d’années) (lire cet article).

Enfin, l’étude montre que les premiers holométaboles (insectes à métamorphose complète) seraient apparus assez tôt dans l’évolution, dès le début du Carbonifère, soit vers 350 millions d’années. L’apparition des plantes à fleur, au Crétacé (145-65 millions d’années), a permis et favorisé une seconde très forte diversification de ces insectes comme les papillons, les mouches et les guêpes (Hyménoptères) (voir illustration ci-dessous).

Cette nouvelle phylogénie, histoire évolutive, des insectes permet de mieux comprendre les processus évolutifs successifs morphologiques et physiologiques ayant amener les insectes à une telle diversité de forme, de biologie et d’écologie.

Le 18 janvier 2016, les résultats de l’étude menée par le français Fabien Condamine offrent un nouveau regard sur l’histoire évolutive des insectes et l’origine de leur diversification. La diversification des insectes serait liée à trois événements majeurs : extinction de masse – changements environnementaux, notamment suite à la crise de la fin du Crétacé – innovations comme le vol et la métamorphose complète. Vous pouvez retrouver l’article en suivant ce lien.

Nouvelle phylogénie des insectes, histoire évolutive des différentes familles (Source : Misof et al., 2014)
Nouvelle phylogénie des insectes, histoire évolutive des différentes familles (Source : Misof et al., 2014)
Phylogénie Etude des relations de parentés entre différents êtres vivants en vue de comprendre l’évolution des organismes vivants
Séquences nucléotidiques Enchainement de bases azotées au sein d’une séquence d’ADN
Taxon Groupe d’espèces ayant le même ancêtre commun

Source : Misof B. et al. (2014) : Phylogenomics resolves the timing and pattern of insect evolution. Science, 346 : 763-767 (lien)

 

Recommandation d’ouvrages sur cette thématique :

– Classification phylogénétique du vivant (Guillaume Lecointre, Hervé Le Guyader & Dominique Visset – Edition : Belin – 559 pages – 3ème édition : 6 mars 2006)

– Classification phylogénétique du vivant vol.2 (Guillaume Lecointre & Hervé Le Guyader – Edition : Belin – 608 pages – 12 avril 2013)

Evolution of the Insects (David Grimaldi & Michael S. Engel – Edition : Cambridge University Press – 772 pages – 16 mai 2005)

The Insects: An Outline of Entomology (P.J. Gullan & P.S. Cranston – Edition : Wiley-Blackwell – 624 pages – 5ème édition : 17 octobre 2014)

Arthropod Biology and Evolution: Molecules, Development, Morphology (Alessandro Minelli, Geoffroy Boxshall & Giuseppe Fusco – Edition : Springer Berlin Heidelberg – 532 pages – 11 avril 2013)


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